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dimanche 27 juillet 2014

Doctrine sociale et vivre ensemble (fin)

La doctrine sociale de l'Eglise : quelle légitimité aujourd'hui ?

     
      Vivre la doctrine sociale de l'Eglise n'est rien d'autre que vivre la charité héritée du Christ mais au service de la cité. Autrement dit, ne mettons pas de distance entre la charité et l'institution/structure, nous risquerions de passer à côté de la «voie institutionnelle de la charité» dont parle Benoit XI dans Caritas in Veritate. Dans cette doctrine, le mot « social » est central. Aussi, il nous faut penser le positionnement de l'Eglise comme complémentaire de l'Etat. Au cœur de l’événement, le discernement et la parole chrétienne demeureront un appui indispensable dont les différentes instances auraient tort de ne pas se saisir.
       Par ailleurs, la crise actuelle nous fait toucher à nos limites et du coup nous rappelle nos devoirs. En cela, la doctrine sociale de l'Eglise retrouve une légitimation dans la mesure où sa pensée, toujours réactualisée, renvoie chacun à sa propre responsabilité, réaffirme le sens du bien commun et s'ouvre à une espérance lucide en fonction de la modernité. Elle nous appelle donc à un acte d'intelligence pour discerner les nécessités du changement.
      En dernier lieu, ce qui permet de légitimer la pensée sociale de l'Eglise, c'est d'atteindre son objectif premier : le salut des hommes.
     N'en doutons pas, la doctrine sociale de l'Eglise est appelée à connaître un nouveau printemps!

Pour ceux qui veulent en savoir plus: 

Les principes de l’enseignement social de l’Eglise comme repères
  •  Au centre l’homme: L’homme, comme être créé à l’image de Dieu, est porteur de droits : ceux-ci résultent de sa dignité propre. Ces droits sont surtout corrélatifs de devoirs à l’égard de soi-même et d’autrui. Le respect et l’exercice de ces droits s’appellent la justice. Ce principe de justice se concrétise et s’explicite dans d’autres principes, bien utiles pour orienter et diriger l’action.
  •  Le bien commun: Dans la vision catholique, le bien commun n’est pas l’intérêt général, lequel pourrait supporter le sacrifice du plus faible. Le bien commun est défini comme « l’ensemble des conditions sociales permettant à la personne d’atteindre mieux et plus facilement son plein épanouissement » (Mater et Magistra 65). Parmi ces conditions : l’eau, l’alimentation, le logement, le travail, l’éducation, l’environnement, les transports, les soins, la culture, la religion.
  •   La destination universelle des biens: Les biens sont compris comme les élé-ments d’une relation, et partant, d’une communion possible dans le nous-tous.

  •  L’option préférentielle pour les pauvres: Depuis que Jésus a dit « ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,40), le souci du pauvre a toujours été un souci fort de l’Eglise, un sceau apostolique (Apostolicam actuositatem 8).


  •  La subsidiarité: La subsidiarité consiste à laisser les institutions et les personnes, au niveau le plus bas, exercer les responsabilités qui peuvent être les leurs .
  •   La participation: La subsidiarité appelle la participation, sans laquelle elle serait vaine ! La participation à la vie sociale et politique est un devoir que tous doivent exercer, d’une manière responsable et en vue du bien commun.
  •  La solidarité: Elle est l’expression décidée de la socialité. On n’est pas moins solidaire en étant bénévole dans une « association de solidarité » que lorsqu’on travaille à ce qu’une  entreprise déploie son activité économique et crée de l’emploi. 



Bibliographie

  • Compendium de la doctrine sociale de l’EgliseJustice et Paix France, Descubes J. Ch., Sodano A., Martino R. R., Cerf, 2005.
  • Notre bien commun, Conférence des évêques de France, Service national Famille et société, Atelier, 2014.
  • Un pas vers Dieu, un pas vers l’homme. La pensée sociale de l’Eglise, Diocèses de Besançon, Belfort et saint Claude, 2013.







jeudi 17 juillet 2014

Doctrine sociale et vivre ensemble (suite)


Les racines de la doctrine sociale de l'Eglise

     On peut d'ores et déjà affirmer que le mérite de cette doctrine est de revenir toujours à la racine de l'humain là où le Créateur a inscrit ce que « la sagesse éthique de l'humanité appelle la loi naturelle » (Benoit XVI, Caritas in veritate). Si nous recherchons ce qui est humain dans l'Homme, nous sommes amenés à choisir entre deux types de rationalités: une raison qui ouvre à la transcendance, c'est à dire à ce qui est supérieur à l'homme ou une raison animée par l'évolution de la technologie. Cette doctrine nous oblige ainsi à un travail incessant sur les profondeurs de notre humanité en nous laissant éclairer par la vérité du Christ.
         D'autre part, l'Ancien Testament pose très explicitement les difficultés du vivre ensemble. L'apprentissage de la fraternité est sans doute aussi vieux que le moment où un peuple prend conscience que Dieu veut entrer en contact avec lui. Avec les dix commandements s'amorce le dessein de Dieu de donner aux hommes des préceptes pour une cohésion sociale centrée sur l'amour du prochain. Et puis, avec l'avènement du Christ, nous découvrons un Dieu trinitaire (Père, Fils et Esprit) dont le cœur est la relation. Le christ se reçoit de son Père et nous aime jusqu'au bout. Nous nous recevons du Christ pour mieux servir notre frère en humanité. Sa pédagogie constitue une véritable source pour qui consent observer sa manière d'accueillir, d'écouter, de respecter et de reconnaître l'autre comme une personne à part entière.
     
      Sur un autre plan encore, lorsque nous recevons le sacrement du baptême, nous rentrons précisément dans une expérience communautaire. L'Eglise est un lieu de vivre ensemble où s'exprime une possible révélation de Dieu au monde. Par notre qualité de disciple de ce temps, nous devons faire notre propre chemin d’Emmaüs avec les autres, inventer des comportements nouveaux en nous inspirant de Jésus. Notre vocation n'est donc pas individuelle, elle s'inscrit dans un peuple. (cf Gaudium et Spes « l'Eglise dans le monde de ce temps » issu du Concile Vatican II).


Un instrument d'évangélisation :
     
      Nous l'avons compris, ce qui fait la doctrine sociale de l'Eglise, ce ne sont pas seulement des textes du Concile, des papes, des évêques, c’est aussi la multitude d’initiatives prises par les chrétiens qu’anime la conviction que l’Evangile est une bonne nouvelle pour la société et pour la famille humaine tout entière. Mais nous ne pourrons annoncer l'Evangile de la vie que si nous l'accueillons nous même. Chacun est invité à prendre sa part dans la mise en œuvre et dans le renouvellement de la doctrine sociale de l’Eglise, appelée à s’enrichir au regard des défis nouveaux. 

       L’invitation à une nouvelle évangélisation concerne aussi les comportements collectifs et les structures sociales. Soyons en sûrs, n'en déplaise aux détracteurs, cette doctrine est vraiment dans son cœur de métier lorsqu'elle parle de justes salaires, de droits de l'homme ou d'environnement. Dans Gaudium et spes, le concile Vatican II est clair. Il met sur le même plan la défense de la dignité humaine et le salut des âmes. Il ne s'agit pas là d'une chapelle latérale, nous sommes bien au cœur de la mission de l'Eglise. Celle-ci se doit de porter un jugement moral quand les droits fondamentaux de l'homme sont bafoués même en des matières qui touchent le domaine politique. 
En outre, cette doctrine a « la valeur d'un instrument d'évangélisation » 
(Jean-Paul II) à la fois pour nous même dans notre propre conversion et pour l'annonce à laquelle l'Evangile nous invite.